vendredi 15 juin 2012

Beaucoup de promesses, trop peu de changement


Président Joseph M Martelly

Le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH) dresse un bilan accablant des 12 premiers mois de Michel Martelly à la tête du pays. Scandales à répétition, assassinats spectaculaires, affaiblissement des institutions publiques figurent parmi les faits relevés par le RNDDH pour prouver que le président Martelly n'a pas tenu ses promesses de campagne.

Martelly n'a pas tenu ses promesses de changement. Pour le RNDDH, le bilan de la première année de Michel Martelly au pouvoir est un échec. Selon l'organisme de défense des droits humains, sur le plan politique, la première année de présidence de Michel Martelly est caractérisée par une instabilité doublée de scandales à répétition, dont des agressions verbales et physiques à l'encontre des membres de la presse, l'arrestation du député de Delmas/Tabarre, Arnel Bélizaire, les rumeurs persistantes sur la nationalité étrangère des membres du gouvernement et du président de la République.

Sur le plan sécuritaire, au moins 785 cas d'assassinat ont été répertoriés à travers le pays entre mai 2011 et mai 2012, en particulier dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Parmi les victimes de l'insécurité figurent 714 tués par balle et 16 à arme blanche contre 39 cas de lapidation.

L'insécurité grandissante qu'a connue le pays au cours de la première année du mandat de Michel Martelly a touché indifféremment des civils, des agents de la PNH, voire des agents de la Minustah. On se rappelle encore l'assassinat spectaculaire de l'ancien président du Conseil d'administration de la BNC, Guyto Toussaint, et de celui du professeur Yves Dorvil. Celui-ci occupait au moment de son assassinat le poste de directeur technique de l'Office national du cadastre. Le notaire Emile Giordani, Gloria Perez Guzman, secrétaire générale de l'association des Dominicains vivant en Haïti, l'inspecteur de police Joël Coffy, Me Briel Lagrandeur, le directeur de Radio Boukman, Jean Liphaite Nelson, Me Jeanty R. Durand figurent aussi sur la longue liste des victimes.

Les agents de la PNH ont été particulièrement visés par les bandits armés. 14 policiers, d'après le RNDDH, ont été tués au cours de la période couverte par le rapport. Le cas de Walky Calixte est le plus médiatisé. L'enquête ne précise pas combien de suspects ont été arrêtés dans le cadre des enquêtes ouvertes par la justice en vue de mettre la main au collet des assassins des policiers et des autres citoyens.

Cependant, pour la période couverte par le rapport, le RNDDH fait état de 23 952 interpellations et arrestations effectuées par la PNH ainsi que de la saisie de 55 armes à feu illégales. L'institution policière a aussi travaillé sur quelque 33 cas d'enlèvement et de séquestration ainsi que 439 cas de viol.

Dans le domaine de la justice, le RNDDH estime qu'aucune des promesses du président Martelly n'a été tenue, notamment la mise en place du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ).

Les relations entre le président Michel Martelly et la presse haïtienne n'ont pas été au beau fixe au cours des 12 mois écoulés. « Le président Michel Joseph Martelly, bien avant son élection à la tête du pays, s'est toujours montré peu tolérant vis-à-vis de la presse », rappelle le RNDDH en précisant les différentes altercations entre le président Martelly et des journalistes depuis sa prestation de serment. Pas moins de sept cas sont notés par l'organisme de défense des droits humains.

D'après le RNDDH, le président Martelly ne respecte pas les engagements pris par Haïti en matière de respect de la liberté de la presse quand il propose aux journalistes les sujets dont ils doivent débattre pour rehausser l'image du pays. « Son intolérance atteindra son paroxysme lorsque le 28 décembre 2011, à Cerca Cavajal, il récompense d'une motocyclette un individu qui brandissait une pancarte exhortant les journalistes à donner une chance au président », s'indigne le RNDDH.

Des voeux pieux

Dans son discours d'intronisation, le président Michel Martelly prenait l'engagement de changer les conditions de vie de la population haïtienne. Il articulait les axes prioritaires de son quinquennat autour de quatre grands points : Etat de droit, Education, Emploi, Environnement. Il s'engageait à remettre le pays sur les rails en apportant aux problèmes cruciaux des réponses concrètes telles que : la création d'emplois, la mise en application de la disposition constitutionnelle relative à l'éducation gratuite et obligatoire, la décentralisation, le reboisement et l'accès aux services sociaux de base à tous. Il annonçait aussi la construction de villages modernes en vue d'assurer le relogement des personnes vivant dans les camps, l'établissement d'un Etat de droit basé sur la primauté de la loi, l'intensification de la lutte contre la corruption, la matérialisation de l'indépendance du pouvoir judiciaire et l'organisation des élections locales.

12 mois plus tard, ces belles promesses restent des voeux pieux. « Aucun programme de création d'emplois n'est mis en oeuvre par le président, révèle le RNDDH. Les résultats du programme de scolarisation gratuite et obligatoire ne sont pas encore patents. De plus, les Haïtiens ont continué de braver la mort en tentant de se rendre en terre étrangère, à la recherche de meilleures conditions de vie.»

Pour le RNDDH, l'établissement de l'Etat de droit et le renforcement des institutions démocratiques, annoncés par le chef de l'Etat sont restés au stade de promesse. « La population, totalement abandonnée à elle-même, croupit dans la misère », affirme le rapport qui s'intitule ''Situation générale des droits humains dans le pays au cours de la première année de présidence de Michel Joseph Martelly. Ajoutant : « Et, plus que jamais, le président semble ne pas se sentir redevable envers le peuple haïtien qui, pourtant, a fait choix de lui pour prendre en main sa destinée, pour encore les quatre années à venir».

En attendant la tenue des prochaines élections locales, le RNDDH dit constater que dans un désordre généralisé, depuis le mois de septembre 2011, le président Michel Joseph Martelly révoque plusieurs Conseils communaux issus des élections locales de 2006 et les remplace par des proches du pouvoir. De quoi porter le RNDDH à tirer la conclusion qu'aucun changement notable n'est enregistré dans la manière de gérer le pays.


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LE POUVOIR POLITIQUE SELON MAX WEBER

Le pouvoir politique selon Max Weber Le pouvoir politique, c'est la domination exercée par une personne ou un groupe de personnes dans une société, dans le but d'organiser celle-ci. La cohérence d'un projet politique est assurée par un pouvoir politique qui mène cette action. Ce contrôle peut être fait à l'encontre de la volonté populaire (dictature) ou au nom du peuple, c'est à dire par et pour le peuple (démocratie). A ce niveau, il est questions de systèmes et de régimes politiques, qui méritent deux fiches supplémentaires! Il faut commencer par définir ce pouvoir politique, puis voir quelles formes il peut prendre. On parlera alors ici de régimes et de systèmes (tout de même), mais aussi de domination, de portées anthropologiques, historiques, culturelles, philosophiques... Pour constater, en conclusion, les choses n'ont pas tant évolué ces derniers siècles... Avec, encore une fois, un rapport à l'actualité. Définition La plus utile, et la plus célèbre, c'est celle qu'a énoncée Max Weber dans Le Savant et le Politique (1919) : "Le pouvoir politique, c'est le monopole de la violence légitime". Retenir cela, c'est déjà posséder l'essentiel en la matière... Il s'agit désormais de comprendre ce que cela implique concrètement. La violence légitime, c'est la violence qui est reconnue par tous comme légitime, c'est à dire nécessaire au bon fonctionnement de la communauté. S'il n'y avait pas de violence dite "légitime", n'importe qui pourrait se faire justice soi-même et la loi du plus fort, ou encore du "chacun pour soi" règnerait. Par "violence", il ne s'agit pas que d'aggression physique, mais aussi et surtout de violence symbolique (exemple : un redressement fiscal ne se règle pas avec des coups de bâton...). Hobbes dit que "L'Homme est un loup pour l'Homme" : Le pouvoir politique permet de distribuer plus ou moins équitablement les droits et devoirs entre les citoyens. Et cela passe par l'acceptation collective d'une autorité qui exerce cette violence légitime, c'est à dire cette possibilité de fixer des limites à ceux qui dépassent les règles et empiètent sur la liberté d'autrui ("la liberté de chacun s'arrête là où commence celle d'autrui"...). Chez hobbes, la société organisée est une nécessité pour échapper à un état de nature qui n'engendre que la guerre. Chez Rousseau, ce "contrat social" est un compromis, une régulation entre l'aspect fondamentalement social de l'Homme et sa nature qui, ici, est pensée comme fondamentalement bonne. Donc, l'armée, la police, la justice, sont des instruments de cette "violence légitime", qui permet d'empêcher ou de punir les cas de violence individuelle (interdire de se faire justice soi-même, c'est lutter contre la Loi du plus fort). Mais ils doivent être utilisés dans un cadre juridique, sans quoi ils deviennent, également, illégitimes. Ainsi, ce pouvoir implique, naturellement, qu'un policier qui fait un usage abusif de son arme soit puni. Tout pouvoir qui ne possède pas de contre-pouvoirs est dit "absolu". La violence légitime est une notion positive, qui doit sans cesse (surtout en démocratie) se remettre en question. Bref, une fois que quelqu'un a le pouvoir de taper, on l'écoute... Donc, le pouvoir politique, qui exerce cette domination légitime, est à même de structurer la société, pour le meilleur comme pour le pire. Pour définir ce qu'est la violence illégitime (celle qui doit être combattue pour assurer le respect des droits et devoirs des citoyens), il est important que les bases du pouvoir reposent sur des Lois, sur une juridiction. Le pouvoir politique peut s'exercer de plusieurs manières... Il faut, dès ici, faire la différence entre trois concepts fondamentaux: les types de domination, les sytèmes politiques, et enfin les régimes politiques... ce sont trois facteurs qui peuvent être cumulés entre eux... Les 3 types de domination politique Encore un formidable éclairage que l'on doit à Max Weber... Trois types: - la domination traditionnelle : le chef est chef en raison de ses ascendances divines, de ses pouvoirs mystiques, de son lien avec l'au-delà... Ex : Selon les sociétés, - tribus d'Amazonie : le chaman est, souvent, le chef du village - Egypte Antique : le pharaon est aussi un demi-dieu... - Royaumes européens : le roi possède une légitimité divine, souvent renforcée par des pouvoirs spécifiques (comme ce fut le cas pour les Rois Thaumaturges) Bref, la domination traditionnelle, c'est la fusion originelle de l'occulte et du politique. Celui qui, dans le groupe, peut revendiquer un lien quelqconque avec l'au-delà, se trouve en mesure de revendiquer le pouvoir politique... traditionnel peut-être mais efficace. - la domination charismatique : c'est le "niveau 2" du pouvoir politique : en raison de son comportement héroïque, de son charisme, de l'admiration irrationnelle qu'un être suscite, celui-ci est considéré comme le chef naturel, spontanément plébiscité... Une survivance moderne de cette domination est le moteur du mythe de l'"homme providentiel" (ou de la femme, bien sûr), encore vivace sous notre Vème République. Exemples concrets : - Attila est le meilleur guerrier des Huns? C'est donc le chef des Huns... - Périclès est le meilleur gestionnaire, tacticien, guerrier, orateur et économiste de la Grèce Antique? Il impressionne même les plus fervents partisants de l'aristocratie? Aucun doute, c'est lui qu'il faut à Athènes... - Plus récent, en France... et beaucoup moins glorieux au regard de l'Histoire : Pétain est un héros de 1914? Alors on espère qu'il va nous sauver en 1940... Comme quoi... Et enfin, le type de domination le plus avancé, le plus moderne, le plus... souhaitable : - la domination légale-rationnelle : là, c'est simple, on prend plus compétent, celui qui est à même de gouverner le pays non pas parce qu'il impressionne, mais juste parce qu'il fait bien son travail... - Euh... Roosevelt aux Etats-Unis, Blair en Grande-Bretagne, Churchill, Giscard (qui n'avait pas un super charisme non plus...). Bref, c'est moderne, c'est administratif, ça fait moins rêver mais c'est plus efficace et souvent bien moins violent. Limites Il faut bien garder en tête que ce sont des exemples absolus, et qu'on peut tout à fait combiner les trois... Je cite un exemple ou deux, tout bêtement, pour confirmer que les dispositifs ici évoqués sont encore bien ancrés... - Nicolas Sarkozy dans la campagne présidentielle : Cela fait trois ans qu'on le présente un peu partout comme l'homme de la situation, comme celui que la France attend... Bref, on fait encore une fois appel au "mythe de l'Homme Providentiel". Depuis Napoléon Bonaparte, ce mécanisme caractérise la France ; plutôt que de croire en la force collective et rationnelle, on va chercher à trouver un sauveur (Napoléon, De Gaulle, Pétain, et sûrement, maintenant, Sarkozy, sauf si son bilan est catastrophique). de manière voulue ou non, Nicolas Sarkozy, aujourd'hui investi, porte ces éléments de domination charismatique, que la "monarchie présidentielle" de notre Vème République facilite par sa structure. Bien sûr, N. Sarkozy a été élu sur un programme... Pas la peine d'en rajouter, il y a aussi et surtout de la domination légale-rationelle dans notre système. Et pour ne pas faire de jaloux... - Ségolène Royal dans la campagne présidentielle : A l'heure du marketing politique et du contrôle des symboles, on peut se demander si l'utilisation de l'imagerie populaire religieuse ou, au moins, mythique, ne tient pas des traits d ela domination traditionnelle... Quand on s'habille en blanc sur proposition des conseillers en communication pour rappeler la Vierge Marie, symbole de la protection par excellence, quand on se présente et que l'on se fait présenter comme l'image la plus proche de "Marianne", ne peut-on pas considérer qu'il s'agit de ce ressort? Surtout que, comme Nicolas Sarkozy, elle aussi s'est dite "habitée" par sa mission. Se sentir "élu(e)" avant les échéances, faire référence au divin, comme pouvait le faire auparavant François Bayrou, tient peut-être encore de cette forme première de domination politique. Heureusement, le Pacte Présidentiel de Ségolène Royal est un exemple clair de légal-rationnel. Or elle aussi succomba à la volonté d'incarner la "Femme Providentielle". cette persistance du charismatique est, sous cette forme, une particularité qui, parmi les pays occidentaux, semble toute française. On pourrait passer en revue les autres candidats de 2007, mais je pense que les exemples sont clairs et que chacun pourra trouver quelle est, par exemple, la part d'"Homme Providentiel" exploitée chez José Bové, Jean-Marie Le Pen, François Bayrou ou encore Nicolas Hulot s'il s'était présenté... Voici donc une présentation non exhaustive du pouvoir politique et de sa définition par Max Weber, qui fait loi en la matière. Un petit résumé : Définition principale : Le pouvoir politique, c'est le monopole de la violence légitime (Max Weber). Car c'est seulement si le pouvoir d'état est respecté que la société peut s'organiser autour d'un point unanimement reconnu, et donc avancer, se structurer. Ce même Max Weber énonce trois types de dominations : - Traditionnelle - Charismatique - Légale-rationnelle ---> Ces trois types peuvent se combiner, même s'ils sont ordonnés du plus archaïque au plus moderne et souhaitable. Or l'Homme n'est pas encore prêt à se contenter de domination légale-rationnelle... qui nécessiterait d'abandonner la passion et l'irrationnel en politique...